Nous nous réveillons assez tôt et un rapide coup d’œil dehors nous montre que le temps est couvert et qu’il commence à neiger abondamment. La bonne nouvelle c’est qu’avec ce ciel couvert, les températures se sont réchauffées. Le mercure affiche désormais un « petit » -22°c. Ce qui ne m’empêche pas de profiter de mon petit café dans la fraicheur matinale.
Pour info, le café en Finlande s’appelle un kahvi. Le kahvi se rapproche plus d’un café américain, c’est à dire que c’est une grosse tasse de café, que l’on se sert généralement au comptoir des cafeterias. Le cafetière passe la journée sur une plaque chauffante afin d’être maintenue au chaud. L’avantage ? Son prix, autour de 1 euro. L’inconvénient ? Son goût, pas souvent terrible. Mais c’est une habitude qu’on prend vite, surtout par ces températures.
Pour aujourd’hui nous avons décidé de faire une boucle d’une petite centaine de kilomètres histoire d’explorer un peu la région. Ce coin n’est pas hyper touristique et nous avons beau décortiquer les guides chaque soir, nous manquons un peu d’infos, surtout en hiver ! On a plusieurs options pour notre boucle, on avisera en fonction de l’état des routes, du temps et de la météo, selon comment cette dernière évolue.
Ce matin comme tous les matins de ce séjour, je suis de corvée de grattage de pare-brise. Mais aujourd’hui entre la couche de neige bien collante qui tombe, et la température, cela fait tout de suite une petite plaque de glace. Forcément cela tombe côté conducteur, mais en plus au niveau des yeux. A croire que c’est fait exprès !
Nous prenons donc la route afin de continuer la route 962 vers Pyhä, c’est à dire l’autre versant du parc naturel. Comme on le craignait les routes sont en moins bon état que les jours précédents. Espérons juste que ça ira pour la suite.
Juste avant d’arrivé à Pyhä nous bifurquons sur la petite route 9621. Qui dit route plus petite, dit moins dégagée et moins empruntée. Nous roulons dans 2 cm de poudreuse, et nous croisons pour seul véhicule qu’un petit vieux dans son tracteur. Au bout de cette route nous tombons sur un petit parking avec une grange en bois et un panneau explicatif. Bienvenue à Suvanto, ce qui en finlandais veut dire « coin perdu ».
Avant d’aller voir à quoi ressemble le village nous nous arrêtons devant cette grange qui semble abriter une barge. Le village est situé au delà de la rivière Kitinen, et un panneau nous explique que jusqu’en 1991 cette barge servait tout simplement à rejoindre l’autre rive. Depuis un pont à été construit pour faciliter l’accès à Suvanto.
Nous jetons un oeil à notre environnement et je m’amuse à trouver ce que le guide du routard décrit comme suit : « Près du bac, une table de pique-nique pour profiter de la totale sérénité du site et de la beauté des bords de la rivière ». Autour de nous règne un silence, la rivière ne fait qu’une avec les berges enneigées et, le pont qui mène à Suvanto se dessine difficilement dans la brume neigeuse. L’ambiance est presque surréaliste mais de toute beauté.
Mais ce village Suvanto à une histoire. Tout d’abord, en plus de dater du 17ème siècle, il faut savoir que c’est l’un des seuls villages de Laponie à avoir échappé à la destruction quasi systématique des Allemands pendant la seconde guerre mondiale.
Il y reste donc un ensemble de bâtiments anciens que l’on ne peut admirer nulle part ailleurs en Laponie. Ce qui fait de ce village un lieu symbolique pour les gens de la région. Il a d’ailleurs été élu « Plus beau village de Laponie » en 1987. Mais sous cet épais manteau de neige, les routes ne sont pas dégagées et on se demande même s’il est habité.
Nous faisons demi-tour devant une magnifique maison jaune avec pour seul habitant un chien samoyède qui nous aboie dessus. Je lirait en rentrant que certains sites internet parle de Suvanto comme d’un « village musée ». Cela explique pourquoi hormis ce chien nous ne croisons personne. Pourtant le panneau près de la barge nous apprenait qu’ils sont encore une trentaine à vivre ici. L’été sans doute. Quoi qu’il en soit l’ambiance de bout du monde est, elle, bien présente.
Nous faisons le chemin en sens inverse sur la route 9621, et recroisons notre petit vieux dans son tracteur, lui aussi en sens inverse. De retour sur la route 962, nous continuons notre route direction Pelkosenniemi où, la faim se faisant sentir, nous espérons trouver quelque chose pour manger. Il neige beaucoup et la route n’est vraiment pas dans un bon état. Surtout qu’à force de s’arrêter nous rencontrons un problème majeur.
L’humidité de la neige qui fond en roulant crée à chaque fois une couche de givre/glace sur le pare brise, ce qui contraint la visibilité. J’ai beau gratter, ça ne part pas et la visibilité est vraiment mauvaise. Nous devons donc limiter un peu les arrêts.
Arrivé à Pelkosenniemi nous avons l’impression d’avoir atterri en plein milieu d’un village perdu du grand nord canadien ou du fin fond de la Sibérie. L’ambiance qui se dégage avec la neige qui tombe et le froid, est plus que dépaysante. On s’attendrait presque à croiser des ours polaires ! J’ai même du mal à vous retranscrire ce que l’on ressent, tellement l’ambiance est surnaturelle. Nous tentons une sortie et tombons sur une statue un peu kitsch posée sur un socle de mosaïque. Une statue d’Andy Mc Coy ! Ce guitariste ayant travaillé avec Iggy Pop est l’un des fondateurs d’un très gros groupe de rock finlandais (Hanoi Rocks). LA star locale, puisque né ici.
A noter que Pelkosenniemi est aussi connu l’été pour son « Championnat du monde d’écrasement de moustiques » ! Si ça tente quelqu’un, le record datant de 1995, est de 21 moustiques en 5 minutes, le tout à la main, s’il vous plait !
Nous en profitons pour immortaliser les panneaux d’élection, puisque la veille au soir s’est déroulé le deuxième tour de l’élection présidentielle. Pour info c’est Sauli Niinistö qui a remporté l’élection face à l’écologiste Pekka Haavisto. Nous avons suivi cette soirée d’élection, ce qui nous a permis de constater que des débats politiques sont possibles sans haussement de tons, ni engueulades.
Revenons à Pelkosenniemi. La visibilité n’excède pas 100 mètres, il neige dru, il y a du vent, et le centre névralgique de la ville semble se résumer à une grande artère, deux ou trois maisons, une station service qui fait office de cafeteria et un K-Market (supermarché). Nous décidons d’aller chercher quelques ingrédients afin de nous concocter des sandwichs maison. Du pain noir, du fromage et du salami (les finlandais raffolent de charcuterie) feront très bien l’affaire, avec en dessert un paquet de gâteaux.
Nous grimpons en voiture près de l’église, ce sera notre point de pique-nique improvisé. Les sandwichs se font sur le tableau de bord tandis que la neige commencent à recouvrir la voiture.
Notre petit en-cas avalé, me voilà à nouveau dehors à gratter la glace et à dégager la neige. Quitte à être dehors j’en profite pour prendre en photo la belle église en bois de 1929. Nous descendons la rue, pour aller se prendre un petit kahvi à la cafeteria de la station service. Je regrette vraiment de ne pas avoir pris mon appareil photo à ce moment car l’instant était vraiment spécial. Assis à l’intérieur de la partie cafeteria de cette minuscule station-service, nous observons cette neige qui tombe dru, ce froid pinçant et les deux cars qui attendent, portes ouvertes, les locaux afin de rallier les villes alentours.
On appelle ce moyen de transport les ski-bus . Ils sont équipés de gros phares longue portée sur le toit, et c’est même à ça qu’on les reconnait. L’atmosphère de cet instant est vraiment spéciale, presque mystique.
Nous repartons et décidons d’opter pour la moyenne boucle. C’est à dire celle qui nous fait passer par Savukoski et remonter sur Sodankylä. Le paysage ? Des sapins, des bouleaux, des petites vallées et ce qu’on devine être tantôt des rivières, tantôt des lacs. On s’amuse des sapins qui d’un coup lâchent des grosses masses de neige sous le coup du vent.
Arrivés à Hihnavaara nous bifurquons vers Sodankylä. Et là, la route que nous pensions correcte (même taille que la précédente sur la carte IGN) s’avère être une petite route à sens unique, avec des refuges tous les 100m. La nuit commence doucement à tomber et le ciel est sombre, chargé de neige. Les voitures et les camions que nous croisons nous aveuglent avec les nuages de neige qu’ils traînent derrière eux.
Nous enchaînons les petites bourgades, semblables à des lieux-dits.
Et là d’un coup, au détour d’un virage, le ciel s’ouvre en deux. D’un coté le gros nuage grisâtre gorgé d’humidité neigeuse qui nous a poursuivi toute la journée, et de l’autre un magnifique coucher de soleil. C’est tout bête mais ça nous fait un bien fou ! Nous trouvons une petite bifurcation et nous nous arrêtons pour prendre l’air, prendre quelques photos et profiter du paysage. L’instant est magique, et c’est notre récompense de la journée.
Nous enchaînons les derniers kilomètres jusqu’à Sodankylä puis jusqu’au chalet. Nous constatons qu’ici aussi il a bien neigé. Le petit chemin qui nous ramène à la maison est très épais et descendons dans plus de 10 cm de poudreuse. Nous refaisons une expédition pour aller chercher du bois. Un bon gros feu, un bon dîner, et une petite bouteille de Kahru (cela signifie l’ours).
Demain, une longue route nous attend, car nous montons plus de 200 km au nord, du coté d’Inari et d’Ivalo, en plein territoire Same.
Laetitia
Posted at 15:48h, 20 novembreBonjour,
Merci pour ce joli blog et le détail de ton voyage 🙂
Ce n’est pas trop compliqué de conduire dans la neige ?
Les voitures de location sont-elles bien adaptées ?
Merci !
Laetitia
retourdumonde
Posted at 22:29h, 20 novembreBonjour Laetitia, comme nous le mentionnons à la fin du carnet, dans la partie épilogue, les voitures de location sont équipées de pneus neige à minima ou plus régulièrement de pneus à clous permettant une meilleur adhérence sur la neige et la glace, donc pas de soucis là dessus. Quant à la conduite, il suffit juste d’être prudent, de ne pas faire de mouvement brusque et de faire attention à la faune (rennes, élans,…) mais rien d’insurmontable. N’hésitez pas à nous faire un mail si vous avez des question !