Formid’Alpes – De Chambéry à La Bauche – Jour 1

Formid’Alpes – De Chambéry à La Bauche – Jour 1

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Formid’Alpes

Road trip automnale entre Chartreuse et Vercors
Jour 1 – 3 Novembre 2018 – 56 km
Jour 1

Jour 1

De Chambery à La Bauche

56 km

Suggestion d’accompagnement sonore :

T-Bone Walker – Vacation
(Polydor– 1969)

Bien que T-Bone Walker pense partir en vacances en Californie là où le “soleil brille chaque jour”, il n’en reste pas moins que lui aussi a besoin d’évasion. Titre présent sur le magnifique Lp Good Feelin’, enregistré en France avec notamment Manu Dibango.

Réveil aux aurores. 4h du matin, les yeux n’ont même pas le temps de piquer, la nuit fût blanche, sans sommeil. C’est toujours la même limonade avant les départs. Même pas du stress, ni de l’attente, mais juste un mélange de tout ça, un fatras foutraque qui me fait garder l’œil ouvert. La peur de manquer le départ, l’envie de tracer la route, nos routes.

Un trajet en taxi dans un Paris qui se ne réveille pas encore, quelques anecdotes plus tard avec notre chauffeur et nous voilà dans le train. Cécile réquisitionne une banquette et pendant 3h et quelques miettes de trajet, toute la rame n°3 du TGV ronfle à l’unisson. Douce mélodie des voyageurs endormis.

Au travers des fenêtres, les paysages de la France défilent, le Morvan se réveille sous une épaisse nappe de coton blanc, la brume envahit tout, remodèle les paysages, redessine les plaines. Et puis de temps en temps, sans logique aucune, les nuages s’écartent et laissent passer un lever de soleil.

De Chambéry nous ne verrons pas grand-chose. A peine sortis on se fait prendre en main par Thibault direction les locaux de We-Van. Un tour du propriétaire, quelques signatures et une remise des clés plus tard, nous voilà sur la route après le passage à l’hyper du coin histoire de faire les stocks de produits basiques, l’occasion pour une sévère révision des fromages savoyards devant un rayon raclette à faire pâlir un turophile.

L’idée sur le papier, si tant est qu’elle soit ferme et définitive, c’est de tirer plein sud, direction le Parc National de la Chartreuse et suivra le Vercors. Ça c’est sur les plis encore frais de nos cartes routières. Pour l’instant on s’éloigne de Chambéry en grimpant une route en lacet qui absorbe le tunnel de l’autoroute juste sous nos pieds et nous emmène un peu plus loin, un peu plus haut vers le brouillard qui s’accroche aux cîmes.

Col de l’Épine
(987 m)

Pour l’instant on ne distingue rien, pas l’ombre d’une queue d’un sommet de montagne, rien. Le paysage est absorbé, supprimé, par une nappe de blanc accrochée comme le serait un enfant aux jupes de sa mère. On croise nos premières plaques de neige, taches de blanc qui pointillent les bas-côtés.

On continuer de grimper le Col de l’Épine, chaque aire de pique-nique a des allures d’Halloween. Des silhouettes de tables vides, des branches, des troncs qui transpercent la brume et apparaissent soudain, formes diaphanes, un brin effrayant. L’air frais et humide qui s’immisce dans nos narines nous rappelle instantanément pourquoi nous sommes là : Respirer tout simplement, au sens propre comme figuré.

Arrivés au sommet des 987 m du Col de l’Épine, arrive le moment de casser la graine. Nos réflexes retrouvent leur place, on se pose, on trouve un coin, je pars en vadrouille aux alentours, l’occasion de disparaître quelques instants dans le brouillard, de se figer et d’ouvrir grand ses sens, on mange, on bouquine la presse locale, on reluque la carte routière. La base.

Les heures filent sans que l’on ne s’en rende vraiment compte et au fond c’est très bien comme ça. Petit à petit, on s’imprègne de notre environnement, de la région, des lieux. On observe, on décrypte, on cherche à comprendre cet ensemble pour être préparés à en déchiffrer les codes à se l’approprier.

Histoire de gentiment entamer un processus de digestion on enquille sur un petit chemin, la Route forestière du Crucifix, tout un programme. Le panneau lui-même a été customisé en circonstance. On croise un mur d’escalade, quelques cabanes précaires parfaites pour un ermite en goguette ou pour une sortie scolaire. On ne pousse pas le chemin très loin, il faut dire que le lever aux aurores, le voyage, le soupçon de stress plus la digestion, tout ça donne un cocktail assez…..enfin qui donne envie de fermer les yeux.

Les Villas Doria
(730 m)

A la redescente du Col de l’Épine, le brouillard ne fait que se renforcer, après un savant calcul digne d’un médaillé Fields, on en déduit que la visibilité est inférieure à 3m. A force de vadrouille au Pays Basque, le brouillard est devenu un compagnon de route qui nous rassure plus qu’il nous effraie. On s’en accommode et descendons jusqu’à tomber le long des Villas Doria qui semblent jaillir du brouillard, tout du moins ce qu’il en reste.

L’histoire de ces Villas Doria est somme toute assez simple. Il faut savoir qu’à l’époque la route du col de l’épine était un axe très fréquenté entre Chambéry et la vallée de la Novalaise. Y transitaient alors, les marchandises, les denrées, mais également toute une vague de nouveaux touristes nouvellement véhiculés !

A la fin du 19e siècle, un certain Monsieur Vadon, riche lyonnais amoureux du lac d’Aiguebelette construit un ensemble de bâtisses qu’il nomme « Villas Dorias ». Grand amoureux de voitures sportives, personnage loufoque et original. Après sa mort, les bâtiments abritèrent un centre de vacances et ça, jusque dans les années 50. Plus tard c’est une communauté religieuse de Carmélite de Chambéry qui pense s’y installer sans donner suite.

Laissées à l’abandon faute de repreneurs, les Villas Doria, isolées en bordure d’une route de moins en moins empruntée tombe petit à petit en ruine et il ne reste à avoir alors pour le touriste de passage, qu’un ensemble de murs en bord de route dont la majorité furent détruit en 1991 pour sécuriser le flanc de la falaise.

Thibaut de We-Van nous avait parlé du Lac d’Aiguebelette, on décide de longer la berge et par conséquent le lac, sauf que voilà, impossible de trouver un coin le long des berges pour se poser et en faire un tour. Les plages sont fermées, et celle de Lépin-le-Lac nous fait déboucher sur un immense parking et un chemin d’accès fermé lui aussi. Les campings sont fermés (rappelons que l’on est tout de même samedi), les villes semblent vides et on en vient à se demander dans quel traquenard on est tombé. Les aléas de se balader hors-saison.

Un poil déçus, on pousse jusqu’à Aiguebelette-le-Lac, pas mal de monde, beaucoup de groupes qui squattent les restos, embrumant les vitres de la chaleur des plats et des conversations. On se rabat sur l’Auberge du Beau Rivage, le temps d’un chocolat chaud, sans avoir de vue sur le lac. L’endroit est assez chouette, des cygnes se baladent sur les berges et on découvre le parking des barques avec chacun son escalier privatif. Un je-ne-sais-quoi de bucolique.

16h arrive, on ne sait pas à quelle heure tombe la nuit alors on part en quête d’un spot pour la nuit. Un petit coup d’œil sur Park4Nights et face à nous s’offrent plusieurs choix. On en élimine un beaucoup trop loin (en fait juste à côté mais aucune route ne coupe et cela nous obligerait à un énorme détour).

On tente une autre piste, un raccourci qui grimpe sur un chemin plus que caillouteux, limite carrossable. Une piste plus proche du 4×4 que du chemin vicinal, qui nous dépose au pied de plusieurs départs de rando. On hésite, surtout à cause du transformateur électrique dont on ne veut pas gêner l’accès en cas de pépin. La lumière bleue combinée à la brume, l’atmosphère devient irréelle, seule la lumière de phares du van arrive à découper ce brouillard à la feuille de boucher.

On abdique, de toute façon, impossible de continuer le chemin, même en 4×4 je m’y risquerais qu’à moitié. On passe deux spots, on ne sait plus où l’on est en montagne ou pas, près d’un à-pic, ou pas. Ce brouillard ne nous aura pas quitté depuis le début de la journée, pas simple pour chercher un coin où se poser. Le premier spot repéré mais écarté, on préfère continuer de grimper la route et on tente quand même d’aller voir le second au pied d’une piste de décollage de parapente. Pas trop mal, mais impossible de se mettre droit.

On remonte de quelques mètres à pince, La route censée continuer se transforme en chemin de rando et en piste d’où en sortira cinq 4×4 de retour d’overlanding. On décide de se garer là, dans cette espèce de clairière, le long de grumes abandonnées. Après quelques minutes à passer à savoir si on est droit ou non, on abandonne, bien trop fatigués pour se déplacer.

On en profite pour vider les sacs, ranger, classer, trier, bouquiner le guide vert de 1981 chapardé à mes parents et je pose quelques notes histoire de rien oublier de cette journée.

Demain, le voyage commence.

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